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TROISIEME PARTIE : THEOLOGIE ET CORAN

Cette troisième partie explore les données théologiques contenues dans le coran, démontre que le texte coranique fut altéré par Omar et Othman qui firent de l'islam une religion concurrente des chrétiens, et montre que l'islam est en réalité un syncrétisme des croyances partagées par les savants arabes de l'époque de Muhammad et que quasiment rien ne correspond a la religion des prophètes bibliques dont Muhammad se réclame auprès des païens arabes;

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LE DESORDRE ORGANISE

 

Le coran actuel ne permet plus de retracer le parcours de Muhammad : le coran selon l'ordre de la descente que nous devons à son scribe Zaïd permet de discerner que la sira (la biographie officielle) est fausse ainsi que les hadits qui ne sont pas tous des paroles de Muhammad.

Le Coran, classé de 1 à 114 sourates, n’est pas l’ordre chronologique de la « révélation ». Il est même pratiquement écrit dans l’ordre inverse de la révélation: les premières sourates sont les médinoises et les dernières mecquoises, a peu de choses près: mais mieux encore, des versets médinois sont ajoutés dans des sourates mecquoises, ou inversement. Ceci a l’avantage de masquer l’évolution de la doctrine prêchée par Mohammed et de rendre moins flagrantes les contradictions apportées par l’abrogation médinoise ; On distingue d’autre part des différences notables entre ces deux catégories de sourates : Les mecquoises prônent croyance en Dieu, moralité et charité. Leurs thèmes sont en adéquation avec ceux de la foi juive et elles ne s’opposent en aucun cas à cette dernière. Quant aux médinoises, elles sont émaillées de graves accusations portées contre les juifs médinois qui étaient donnés en exemple à la Mecque. À La Mecque, bien que raillé par certains Arabes, Mohammed conserve toujours une certaine réserve. À Médine par contre, il exprime de l’agressivité à l’égard des « mécréants » comme des récalcitrants. Les sabéens, mazdéens et nazaréens qui étaient en grâce deviennent les ennemis des croyants, comme par hasard au moment où Othman veut attaquer les byzantins et les perses mazdéens ; Les sourates médinoises rapportent aussi comment il engagea une politique de conquête que la tradition appelle djihad. Les thèmes apocalyptiques, le style lyrique et emphatique adopté par les sourates mecquoises laissent place dans les médinoises à des formulations prosaïques, ainsi qu’à quelques lois péniblement élaborées, qui sentent le travail de scribe : Il est tout à fait certain que les sourates médinoises ne sont pas du même auteur que les sourates mecquoises : la logique, la rythmique et les dialectiques sont évidemment différentes à tous les niveaux au sein des deux périodes.

Ce classement traditionnel, adopté des années après la mort de Muhammad, ne peut donc nous présenter le cheminement du prophète, mais l’exégèse a réussi à restituer à peu près l’ordre de la révélation.

Othman prétendait que « lorsqu’une révélation lui était transmise, le prophète Mohammed faisait appeler l’un des scribes à son service et lui disait : « Mets ces versets dans la sourate où telle et telle chose est mentionnée » et si un seul verset était révélé, il disait : « Mets ce verset dans telle sourate ».

Mais ce travail est évidemment dû à Othman et non au messager puisque la tradition admet d’autre part que les feuillets du coran mis par écrit par Zaid n’avaient pas d’ordre particulier. D’autres commentateurs de l’époque mettent en avant le fait qu’Othman aurait placé des « hadiths » (parole de Muhammad) en tant qu’ « ayats » afin de servir ses intérêts belliqueux, en sortant les imprécations du messager contre ses adversaires médinois de leur contexte tribal, dans le but de justifier ses agressions. Il est en tout cas certain qu’Othman fut gravement contesté durant son califat, et il finit par être assassiné par des musulmans partisans d’Ali, qui deviendra calife avant d’être assassiné à son tour…*

Quoiqu’on pense de ces évènements, on peut s’entendre sur le consensus suivant reconnu par la majorité des savants :

 

  • Les traditions concernant la collecte du Coran sont des reconstitutions tardives (déformations) qui veulent convaincre de l’inaltérabilité du coran dans un but politique.

  • L'intervention du calife 'Utman (r.644-656) est une réalité historique, même si la portée de celle-ci est à nuancer.

  • Le Livre de Dieu, symbole de l'autorité califale, fut un des moyens pour légitimer le pouvoir omeyyade. (l’Importance du contexte politique depuis 632 est à prendre en compte)

  • La fixation du texte coranique est un processus long et complexe étalé sur plus de 3 siècles.

  • Le texte original écrit en dialecte Quraych n’est plus lisible par les arabes d’aujourd’hui qui ne parlent plus cette langue, et le texte connu aujourd’hui en arabe contemporain est donc à considérer comme une traduction, et donc comme une interprétation.

DU CORAN CREE AU CORAN INCREE

« Les textes sacrés ont leur histoire ; mieux la connaître nous invite non pas à moins y croire mais à moins les idolâtrer. »  (R. Girard)

 

Le coran fut longtemps considéré comme un livre inspiré, une interprétation des révélations mystiques dont bénéficia le messager en langue arabe ; Il y a une doctrine qui s’est imposée à la fin du VIIIème siècle, selon laquelle le Coran est un livre sacré qui ne fut pas créé par des hommes, mais qu’il est éternel et divin. Il est cependant improbable que le Calife Othman ait été capable de réussir à uniformiser toutes les variantes du Coran pendant les quelques années qui ont suivi la mort de Mahomet.  Des débats s’ouvrirent alors pour définir  la part d’interprétation accordée à la révélation (ijtihad) et le coran fut longtemps considéré comme un livre saint égal aux deux autres livres descendus, la torah et l‘Injil, dont chacune des communautés furent gratifiées, chacune selon ses spécificités. Mais après l’expansion califale et l’établissement de l’empire Omeyade, l’empire iranien qui prit la succession commença à étendre ses prétentions hégémoniques dont le coran devint l’instrument principal : l’universalisme prétendu du message coranique devint la justification de la politique expansionniste des abbassides après le 8eme siècle. On commença alors à discuter de la divinité et de la prééminence du coran sur tous les autres livres, c’est à dire sur tous les autres peuples monothéistes d’alentour qui étaient alors en pleine décomposition, tandis que l’empire chrétien d’occident commençait son expansion.

 

Ces discussions relatives à l’éternité du message coranique  ont été influencées par les débats avec les théologiens chrétiens de Damas et la doctrine chrétienne du « Logos ».* Le conflit, parfois violent, autour de la création ou de la non-création du coran se cristallise autour de deux principales écoles :

- L'École des Mutazilites (fondateur : Wasil ibn Ata) partisane du Coran créé, c'est-à-dire distinct de Dieu et contrairement à Lui, survenu dans le temps. Le mouvement Mutazilite - ardent défenseur de l'unicité divine- défendait que le Coran était une création pour défendre l'immutabilité de Dieu et pour éviter que ne soit associé quoi que ce soit à Allah car l'autre thèse (celle de l'incréation) pose de grosses difficultés à une perspective favorisant l'exercice de la raison (interprétation).

Pour ces penseurs, la présence de mentions, dans le Coran, d'événements à valeur historique implique que, si le Coran est incréé, l'ensemble des actions humaines ne peut être que fixé par prédestination, ce qui s’oppose à la notion de libre arbitre, et donc de jugement** : attribuer à Dieu une parole éternelle,

 

- Les représentants de la Tradition avec à leur tête Ibn Hanbal d'une des quatre écoles de fiqh (jurisprudence). Pour eux, le Coran est incréé car il participe de la substance de Dieu, il en est inséparable, intemporel et au-dessus de la raison. Pour Ibn Batta, cette intemporalité s'applique à chaque mot et chaque lettre du Coran. « Le Coran est littéralement Parole de Dieu. Il est donc éternel, et incréé » ; et, ajoutaient les plus ardents, est incréé même ce qui se trouve écrit entre les deux plats de la couverture du livre, c’est-à-dire les exemplaires écrits du Coran, avec les lettres, l’encre et le papier » ; le coran se trouve ainsi divinisé même sous son aspect matériel, ce qui constitue immanquablement une « association », et une forme d’idolâtrie puisque la parole se matérialise sous la forme d’un texte en langue humaine. On passe alors d’une révélation orale (coran : récitation) à une révélation écrite (livre, « kittab »).

 

Le calife abbasside Al-Ma'mun (VIIIe-IXe siècle), par intérêt politique, voulut contrer la seconde école, ce qui conduisit notamment à l'emprisonnement de Ahmed ben Hanbal, avant de s’être finalement, selon Ya’qubi, « laissé convaincre de dire, au moins de façon formelle, ce que le calife ordonnait de dire ». Le second mouvement prit sa revanche sous le califat de son successeur Jafar al-Mutawakkil qui, pour des raisons de politique intérieure, persécuta les partisans du premier mouvement qui disparurent peu de temps après. La mise en place de cette doctrine de non-création entraîna celle de l'éternité du Coran ; ce tournant aboutit à une survalorisation du rôle du prophète Muhammad dans le sunnisme qui fut divinisé en même temps que le coran qu’il incarnait ; Cette doctrine ne reçut une consécration califale officielle  qu'au XIe siècle lors de la lecture de la « Qadiriyya ».

 

LE CORAN EST LE NOUVEAU MESSIE

 

Il va sans dire que le processus de "divinisation" que les musulmans reprochent aux chrétiens au sujet du christ qu'ils reconnaissent pourtant aussi d'origine divine est exactement ce qu'ils ont fait au sujet du coran: faire d'un livre l'égal de Dieu: le coran serait écrit dans le ciel (le livre mère, Oum El Kittab), et placé à la droite de Dieu sur une « table gardée », la ou les chrétiens situent le Christ !

Cette thèse a donc pour effet de remplacer le fils de dieu qui est « parole de Dieu »  par le livre de Dieu, qui serait donc la parole d’Allah incarnée. Ce livre est sensé le définir entièrement, ce qui revient à réduire Dieu à un texte fini, lui qui est nécessairement infini. Tout est censé être dit dans le Coran, thèse infirmée par l’existence même des hadiths, car si le coran contenait la plénitude de la révélation, on n’aurait nul besoin de hadiths pour le compléter, et nous verrons qu’en réalité les hadiths furent produits par les abbassides dans le seul but de contredire le coran la ou les versets ne servaient pas leurs visées expansionnistes. C’est d’ailleurs le coran qui interdit d’associer des hadiths à la révélation plénière du messager…

 

Selon les ulémas, le coran est donc incréé, et  il existait avant la torah et l'Injil, qui furent des révélations partielles en attendant la révélation plénière prévue pour le peuple élu qui remplacerait les juifs et les chrétiens maudits pour avoir prévariqué au sujet de leur révélation.

Toute la démonstration coranique qui veut que Muhammad soit envoyé aux illettrés arabes pour qu’ils soient informés du message donné aux prophètes va s’inverser avec la sunna pour imposer l’idée d’un prophète envoyé aux arabes pour universaliser leur religion, ce qui est le fait des califes et non du prophète médinois qui ne parlait qu’aux arabes.

LE CORAN, MIRACLE D’ALLAH ?

Le mot "ayat" qu'on traduit par « verset » signifie en fait "signe" en arabe : lorsque Muhammad reproche aux mecquois de ne pas croire aux "ayats Allah" : les musulmans traduisent généralement par : "à ceux qui ne croient pas aux versets d'Allah", alors qu’il faut lire en fait : " à ceux qui ne croient pas aux signes de Dieu", c'est à dire aux miracles** qui sont décrits par sa prédication, ceux qui concernent l'histoire sainte, comme les miracles de Moise ou ceux de Jésus; ce sont d'habiles théologiens qui ont voulu que le mot ayat désigne à la fois « verset » et « signe » afin d'entretenir la confusion et donner l'impression que Muhammad invoque le coran comme preuve de sa mission, afin d’imposer l’idée que le coran est un miracle, pour contrer l’objection des judéo-chrétiens qui exigent des signes pour prouver la mission de Muhammad qui affirmait qu’il n’était pas venu pour faire des miracles, mais pour annoncer ceux des prophètes..*** C'est encore trahir le messager que d’interpréter le coran à décharge en donnant de mauvais arguments quand il en donnait des bons : Muhammad avait certes une plus grande âme que les ulémas et quand il parle des « signes » d'Allah qu’il ne pensait pas à réduire au niveau des versets d'un livre qu’il ne voulait pas écrire, mais invoquait la grandeur de la création, des étoiles et des fruits, de la mer et du parfum, et il produisait ainsi de meilleurs arguments pour convertir les hommes que les versets d'un livre qui ne sont que des productions bien inférieures. Le contexte des sourates qui utilisent cette expression évoquent d’ailleurs évidemment autre chose que les versets qu’il récite et qui d’ailleurs ne s’appelaient pas encore versets puisqu’aucun livre nommé coran ne comportait encore de sourates ni de versets au moment où Muhammad récitait sa révélation : c’est abd al Malik qui découpa le texte en sourates et en versets, tandis que le texte original ne comportait ni voyelles ni coupures, et donc aucun verset !

Ainsi, la réforme du coran qui a été rendue impossible par l’élaboration du dogme de l’inaltérabilité du texte coranique ne peut se faire qu’au prix d’une désacralisation des textes, et « l’aggiornamento » de l’islam ne pourra se faire qu’à cette condition de reconnaitre que l’évolution d’une religion ne fait pas régresser Dieu qui n’est pas le captif des enjeux politiques des hommes.

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